Laurenz Rex et Hugo Page, tenue de chrono sur le dos, attendent avec impatience l’arrivée de Biniam Girmay, sur la Place Masséna de Nice. Dans les coulisses, ils sont nombreux à espérer l’arrivée du coureur érythréen, à retenir leurs larmes. Le moment est historique. «Bini» devient officiellement le premier coureur d’Afrique subsaharienne à remporter le maillot vert du Tour de France. La première victoire d’étape, à Turin, donnait déjà à la Grande Boucle, une dimension historique pour l’Afrique noire. Le bilan triplé et le gain de la tunique verte accentuent ce phénomène.
Au passage devant ses supporters (environ 300) sur la Promenade des Anglais, le puncheur érythréen a eu l’occasion de réaliser l’exploit qu’il venait de réaliser. La ligne franchie, en tombant dans les bras de ses coéquipiers et son staff, il n’a pu retenir ses larmes au moment de livrer son ressenti. Avant une parade méritée auprès de ses compatriotes érythréens. «Je remercie Dieu pour tout ce qui m’arrive. Je n’étais pas venu au Tour de France avec de telles ambitions. Je ne m’attendais pas à vivre un tel rêve. Je venais simplement pour prouver que je ne suis pas un mauvais coureur. Depuis le début de ce Tour règne une ambiance incroyable dans l’équipe, entre coureurs, staff, management. Je souhaite les remercier. C’est cette atmosphère qui est la clé de notre succès. Avec nos moyens, nous avons accompli de grandes choses. Pour mon pays, c’est un nouveau chapitre. C’est spécial pour l’Afrique, évidemment».
Vers une prolongation de contrat
Dans une partie de la Belgique, où les Gilles ont rangé leur costume de carnaval depuis un moment, on ne manquera pas de marquer le coup pour ce qui constitue la plus belle page de l’histoire de l’équipe Intermarché-Wanty. Chasseuse d’étapes depuis sa première participation, la formation wallonne a concrétisé son rêve à Turin, avant de vivre un véritable rêve éveillé jusqu’à Nice. La chute de Girmay à Nîmes a installé une certaine inquiétude, mais l’issue s’est montrée favorable. «C’est évidemment le meilleur Tour qu’on ait jamais fait», souligne Jean-François Bourlart. «Au fur et à mesure des jours, on s’est dit que garder le maillot vert était une option réalisable. On rentre à la maison avec ce maillot, c’est tout simplement extraordinaire. Tous nos coureurs sont des champions, ils ont tout fait pour qu’on garde ce maillot. Notre état de fierté est très élevé. Bini est un garçon charmant, c’est un réel bonheur de travailler avec lui. Cela nous donne de belles perspectives pour les années à venir.»
Girmay va désormais prendre quelques heures pour profiter de sa tunique, panser ses plaies et retomber de son nuage. La figure de proue d’Intermarché n’aura, néanmoins, pas le temps de se mettre au vert quelque temps car l’échéance des Jeux olympiques se rapproche à la vitesse de l’éclair. À la base, la Grande Boucle devait être une rampe de lancement pour le rendez-vous olympique, mais l’histoire verte a changé la donne.